Lauréats des commissions mécénat
de la Fondation des ArtistesAjouter un lauréat

Que pourrait représenter aujourd'hui Carthage, cette cité légendaire fondée par les Phéniciens et rasée par les Romains pour imposer leur règne sur l'Afrique du Nord et éliminer les vision du monde concurrente qu’il incarnait ? L'écrivain et théoricien Édouard Glissant rêvait de Carthage comme une ville de carrefour et de rencontres, riche de cultures différentes, un des premiers lieux de « créolisation » où ce rapprochement d’éléments divers pourrait créer de nouveaux des possibilités culturelles, plus grandes que n'importe quelle somme de ses parties. Le premier volet du sel noir (1956) est dédié à la métropole cosmopolite et – comme beaucoup d’autres avant et depuis – il se demandait spéculativement dans un article intitulé « Et si Carthage… ? » : « Et si Carthage n’avait pasété détruit ?’ Quel genre d’espace la Méditerranée aurait-elle pu devenir si Carthage avait continué à exister comme force génératrice en contrepoids à Rome ?
Nidhal Chamekh prend la question de Glissant et la renverse, affirmant la puissance latente du multivers de chemins inédits et supprimés dans les histoires des « vainqueurs » et des « vaincu », de triomphes et de mises à sac. Son assemblage sculptural Masque noir, tête de Niobides (2023) figure littéralement la fusion des cultures africaine et gréco-romaine et la compression de la différence culturelle. Dans les recherches de Chamekh qui sous-tendent ce corpus de travaux, il souhaitait rendre visible les influences anciennes de l’Afrique du Nord sur l’Antiquité romaine.
Chamekh souligne comment Carthage elle-même persiste à Rome et ailleurs à travers une pléthore d'œuvres culturelles et iconographiques.

Kathryn Weir